Concours ATEA : il faut revenir à l’essentiel !

05/11/2017
Les échanges, réactions ou commentaires auxquels nous assistons sur les réseaux sociaux et dans nos propres sphères professionnelles sont le reflet d’une situation totalement anormale et dont les différentes tutelles doivent prendre aujourd’hui la mesure.

Cette situation suscite énormément d’inquiétude et d’anxiété pour toute une génération d’enseignants qui, bien qu’ayant poursuivi des cursus d’études exigeants et conformes à ce qui était attendu d’eux1, se trouvent confrontés à une très grande précarité professionnelle et un grand isolement.

Deux éléments me paraissent illustrer cet état de fait : l’incroyable technicité des questions qui circulent actuellement et qui, toutes ou presque, traitent de problématiques juridiques ou organisationnelles, d’une part, et l’expression d’un très fort besoin de formation portant principalement sur des aspects autres que la pratique et l’enseignement artistiques (présentation du dossier, préparation aux techniques d’entretien, connaissance des textes cadres, environnement professionnel, etc.), d’autre part.

Aussi faut-il rappeler cette évidence : les épreuves de ces concours ont d’abord pour objet de vérifier que les candidats disposent bien des aptitude et de la motivation à exercer les fonctions dévolues au cadre d’emplois, notamment dans la discipline qu’ils ont choisie !

Rappelons également qu’il s’agit d’accéder à un cadre d’emploi de catégorie B et que, sans dévaloriser qui que ce soit, je ne suis pas certain que la connaissance des incidences de la loi Notre ou encore de la clause de compétence générale fassent partie des connaissances devant être maitrisées à ce niveau, compte tenu des missions dévolues au cadre d’emplois de ces enseignants artistiques.

Là encore, il peut être salutaire d’indiquer que l’annexe 2 de l’arrêté du 27 avril 2017 fixant le programme des épreuves de ce concours stipule que le candidat pourra être interrogé sur les missions et la place d’un conservatoire dans la cité en demandant une connaissance élémentaire du fonctionnement d’une collectivité territoriale, de l’organisation administrative d’un conservatoire et des cadres d’emplois de la filière culturelle de la fonction publique territoriale.

La note de cadrage de l’épreuve d’entretien fait état « des connaissances minimales [portant sur les] collectivités territoriales [qui] sont ainsi indispensables à tout candidat, le jury vérifiant la maîtrise de connaissances basiques qu’un citoyen éclairé et a fortiori qu’un fonctionnaire territorial ne sauraient ignorer.

Voilà qui devrait rassurer les futurs candidats quant au niveau où doit être positionné, de façon règlementaire2, le curseur des questions afférentes à l’environnement professionnel.

…Encore faudra-t-il s’assurer que ces consignes seront bien rappelées avec précision et de façon identique à l’ensemble des membres des jury et cela, dans tous les centres organisateurs.

Deuxième point évoqué, l’expression, par les enseignants eux-mêmes, de ce très fort besoin de formation ne manque pas d’interroger même si, dans un premier temps, on aurait plutôt tendance à s’en réjouir.

Pour autant, cette forte demande me semble être l’expression de la grande inquiétude qui entoure l’organisation de ces concours du fait, principalement, qu’ils n’ont pas été ouverts depuis 2011 et qu’ils seront donc probablement très sélectifs au vu du nombre important de candidats potentiels.

L’organisation de ces concours a été confiée aux centres de gestion en 2010 ; cette session sera donc pour eux la deuxième du genre et beaucoup de candidats malheureux de 2011 ont en mémoire certaines difficultés d’ordre organisationnel qu’ils ont eu à subir.

Les textes règlementaires – les fameux « décret et arrêté concours » réécrits en 2017 – ne sont pas exempts d’incohérences, voire de contradictions, entraînant ainsi son lot d’interprétations et d’analyses parfois divergentes.

Pour exemple et sans vouloir trop insister sur le cas du 1er grade des ATEA3, il suffit de lire la brochure correspondante éditée par le Service concours du Centre interdépartemental de la Grande couronne (CIG de Versailles) qui chapeaute l’ensemble de l’organisation de ce concours.

À la page 6 du document, rubrique « Nature des épreuves », il est fait mention dans le titre du concours externe sur titre avec épreuve – Toutes spécialités – Toutes disciplines, sans préciser que, pour ce grade, seules les deux disciplines d’accompagnement (musique et danse) sont ouvertes !

L’ambiguïté n’est à aucun moment levée dans ce chapitre et, pire, elle est entretenue par la formulation concernant le programme de l’épreuve : le candidat peut être évalué sur tout ou partie des sujets suivants : […] pour la Spécialité musique : – culture musicale, et en particulier dans la discipline et le domaine concernés, …laissant croire que toutes les disciplines instrumentales sont possibles, ce qui n’est pas le cas, bien évidemment

Il aurait été prudent d’indiquer « dans la discipline accompagnement musique ou accompagnement danse ». Au passage et à ma connaissance, le terme de « domaine concerné » n’est pas défini dans le décret concours4 bien que figurant, mais sans être défini pour autant, dans l’annexe 1 et 2 de l’arrêté concours5

Pas étonnant que certaines collectivités (et, probablement aussi certains CDG) se soient trompées dans le recensement des postes comme je l’avais signalé dès la parution des arrêtés d’organisation6.

Face à cette situation, on peut comprendre que les candidats déjà très inquiets par le concours lui-même, cherchent à se rassurer en sollicitant des formations pour leur apporter des réponses que même les experts du sujet ont parfois du mal à fournir.

Ceci étant dit, il m’apparait essentiel d’encourager les candidats en leur indiquant que la plupart des réponses à leurs questions sur le contexte d’organisation proprement dit (choix du type de concours) sont accessibles sur divers documents (site de la Philharmonie, Indovea, …) et qu’une lecture attentive des quelques textes réglementaires – 2 décrets et 1 arrêté – peut s’avérer fort utile.

Enfin, je ne saurai trop conseiller aux candidats de prendre un peu de recul et de profiter de ce moment de préparation pour adopter une posture réflexive sur leurs propres pratiques professionnelles. Ce peut être une belle occasion pour faire un point d’étape sur les évolutions du contexte d’exercice du métier d’enseignant.

Se préoccuper de la place de l’enseignement artistique spécialisé à un moment où le discours politique met beaucoup  en avant l’éducation artistique et culturelle ; s’interroger sur les nouveaux formats pédagogiques ayant déjà cours dans de nombreux conservatoires et développant l’apprentissage par la pratique collective, interrogeant de facto la place du cours individuel ; la prise en compte du numérique ; considérer le conservatoire comme un établissement culturel à part entière et voir ainsi comment il doit s’inscrire dans la politique culturelle de son territoire ; se préoccuper du fonctionnement interne de son établissement, tant sur le plan pédagogique, que sur le plan administratif (travail en équipe, espaces de dialogue et de concertation, projets transversaux, …), etc.

Bref, se centrer sur ses aptitudes à exercer les fonctions liées aux missions dévolues au cadre d’emplois et donc s’appliquer, dans un premier temps, à les énumérer et bien les définir ; Voilà ce sur quoi doit porter l’essentiel de la préparation aux épreuves des concours, qu’il s’agisse de l’externe, de l’interne ou du 3ème concours.

Pour le reste et pour ma part, je tenterai de continuer à apporter les éléments de contexte qui pourront être utiles aux candidats dans le cadre de cette préparation, en veillant à ce qu’ils restent accessibles à tous et à toutes7.

Pour conclure,  permettez-moi cette petite citation que j’aime tout particulièrement :

« La chance : plus je travaille, plus elle me sourit ! »
Stephen Leacock, écrivain et humoriste canadien.

Alors, BON TRAVAIL !


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  1. Les habilitations délivrées aux établissements d’enseignement supérieur relèvent bien des prérogatives de l’Etat.
  2. Voir Décret n° 2012-1019 du 3 septembre 2012 fixant les modalités d’organisation des concours pour le recrutement des assistants territoriaux d’enseignement artistique (modifié par le décret n°2017-664 du 27 avril 2017)
  3. Voir mes différents billets sur le sujet !
  4. Décret n° 2012-1019 du 3 septembre 2012 fixant les modalités d’organisation des concours pour le recrutement des assistants territoriaux d’enseignement artistique
  5. Arrêté du 27 avril 2017 fixant le programme des épreuves des concours d’accès au cadre d’emplois des assistants territoriaux d’enseignement artistique et des assistants territoriaux d’enseignement artistique principal de 2e classe
  6. Voir : https://indovea.org/2017/08/24/atea-1er-grade-une-confusion-dans-le-recensement-des-postes/
  7. Voir surgir ici ou là toutes ces propositions de formation, dont certaines coûtent près de 1000 € à la charge du candidat me pose très fortement question sur le plan éthique…!

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